Je me souviens très bien de la première fois où j’ai vu le prix noir sur blanc : 189 190 € pour une cravate. Pas un yacht, pas une montre tourbillon, pas un tableau adjugé chez Christie’s. Une cravate. Un objet que l’on noue en quelques secondes, que l’on défait machinalement le soir, et qui finit bien souvent pendu au dos d’une chaise. C’est à ce moment-là que j’ai compris que cette enquête serait moins une histoire de mode qu’une histoire de pouvoir, de récit et de déraison.
Au début, ma question était naïve : pourquoi payer aussi cher ? Très vite, elle est devenue plus dérangeante : qu’est-ce que ces cravates disent de nous, de ceux qui les fabriquent et de ceux qui les portent ? Quand une maison indienne comme Satya Paul associe soie, or et diamants pour fabriquer la cravate la plus chère du monde, quand HexTie transforme la cravate en armure dorée à 31 000 $, quand Stefano Ricci incruste ses modèles de cristaux et de pierres précieuses, on n’est plus dans l’élégance. On est dans la démonstration. Dans le totem. Dans le record.
J’ai donc décidé de prendre la cravate comme fil rouge (le jeu de mots est trop tentant) pour remonter toute la chaîne : des pièces totalement déraisonnables jusqu’aux cravates que vous pouvez réellement nouer le matin. J’ai voulu confronter les extrêmes – diamants, or 24 carats, titane plaqué – avec ce que beaucoup d’hommes considèrent comme “le vrai luxe” : une Hermès bien choisie, une Charvet discrète, une Marinella napolitaine, une cravate française de chez Cinabre ou un bon “smart buy” qui ne vous ruine pas mais vous respecte.
Ce reportage n’est pas un catalogue, ni un publi-reportage déguisé. Je ne suis ni styliste de plateau télé, ni vendeur en boutique. Je suis venu poser des questions simples :
– Qu’est-ce qui justifie vraiment la différence entre une cravate à 30 €, 150 € et 250 € ?
– À partir de quel montant ne payez-vous plus la matière, mais seulement le logo et le storytelling ?
– Qu’est-ce que lit réellement quelqu’un qui s’y connaît quand il regarde votre cravate ?
Pendant cette enquête, j’ai étudié les records absurdes, les maisons mythiques, les artisans de l’ombre et les marques plus rationnelles. J’ai comparé les matières, les constructions, les prix, mais aussi les récits que ces cravates véhiculent : l’obsession du statut, le besoin de reconnaissance, la tentation de l’ostentation ou, au contraire, la recherche d’un luxe discret réservé aux initiés.
Ce que vous allez lire n’est donc pas seulement un “top des cravates les plus chères du monde”. C’est un voyage du sommet au plancher : de la cravate-totem à presque 200 000 € jusqu’aux modèles grand public “suffisamment corrects”, en passant par les cravates de logo autour de 200–250 € et les alternatives intelligentes que peu connaissent. À chaque étape, je vous dirai franchement ce que ces cravates valent, ce qu’elles racontent et si elles méritent – ou non – votre argent.
Si tout va bien, vous ne regarderez plus jamais une cravate de la même façon. Et, surtout, vous ne la nouerez plus par réflexe, mais par choix.
I. Meilleures marques de cravates de luxe – segment ultra-ultra-luxe
1. Satya Paul / Suashish – La cravate la plus chère du monde à 189 190 €

L’histoire de la cravate Suashish n’est pas celle d’un accessoire de bureau, mais celle d’un coup de tonnerre médiatique. Au début des années 2000, le Satya Paul Design Studio – maison indienne connue pour ses saris et ses imprimés sophistiqués – s’associe avec la société de diamants Suashish pour créer un objet impossible : La cravate la plus chère au monde.
Présentée en 2003 lors d’un défilé caritatif à Mumbai, portée par la star de Bollywood Salman Khan, cette cravate n’a jamais eu vocation à rejoindre un dressing normal. Elle est pensée comme un manifeste, un totem : montrer jusqu’où l’on peut pousser l’idée de luxe appliquée à l’accessoire masculin.
Ce qui m’intéresse ici, ce n’est pas seulement le délire des chiffres, mais la logique stratégique : on prend un symbole de l’ouvrier et de l’homme d’affaires – la cravate –, on lui injecte de l’or et des diamants jusqu’à l’absurde, et on observe comment le marché réagit. On ne vend plus un objet à porter, on vend une légende qui fera le tour du monde dans les médias.
Spécifications techniques
Produit iconique : Cravate Suashish (pièce unique)
- Matières principales
- Soie de haute qualité (base textile)
- Environ 150 grammes d’or 24 carats
- 271 diamants pour un total d’environ 77 carats
- Construction
- Base : cravate en soie classique (coupe et format comparable à une cravate de cérémonie)
- Or et diamants incrustés sur la face visible, dans un motif dense qui recouvre une grande partie de la longueur
- Pièce réalisée sur commande avec un niveau de joaillerie digne d’un collier de haute couture
- Origine & contexte
- Design : Satya Paul Design Studio (Inde)
- Partenaire joaillier : Suashish (spécialiste du diamant)
- Présentation : défilé caritatif « Cultural Ties » à Mumbai (2003)
Prix
- Prix annoncé :
- Environ 189 190 € (≈ 220 000 $ selon les sources/époques et le taux de change)
Ce montant fait de la cravate Suashish la cravate la plus chère jamais réalisée dans les classements internationaux – bien au-dessus des cravates Stefano Ricci serties de cristaux ou des créations expérimentales en fil d’or.
Avis
Soyons clairs : il n’existe pas d’“avis client” au sens classique sur cette cravate.
Pas de score 4,3/5 sur un site e-commerce, pas de commentaires “taille un peu longue”…
On a plutôt :
- des articles de presse,
- des blogs spécialisés luxe / records,
- des mentions dans des listes “most expensive ties in the world”.
En agrégeant ce qui se dit, on observe trois réactions types :
- Fascination
- “C’est l’accessoire ultime”, “objet de collection”, “record fascinant”.
- On regarde cette cravate comme on regarde une supercar ou un tableau adjugé à des millions.
- Incrédulité / ironie
- “Personne ne va porter ça”, “c’est indécent”, “absurde de mettre ce prix dans une cravate”.
- La dimension de coup de communication est souvent pointée.
- Lecture stratégique
- Certains analystes y voient un case study : comment une maison relativement peu connue hors d’Inde parvient à inscrire son nom dans l’imaginaire mondial du luxe via un record.
Si je devais traduire ça en notation “avis”, on serait sur quelque chose comme 3,5/5 :
- 5/5 en impact médiatique,
- 5/5 en exécution technique,
- 1/5 en “portabilité” réelle.
Avantages
- Record mondial :
- C’est officiellement (et symboliquement) la cravate la plus chère du monde. Pour un collectionneur, un musée ou un showroom de marque, c’est un totem.
- Exécution joaillière :
- 271 diamants, 150 g d’or, intégrés sur une base textile : d’un point de vue technique, le projet est impressionnant.
- Puissance de storytelling :
- Cette seule cravate a suffi à inscrire Satya Paul dans toutes les listes “most expensive ties”.
- Pour moi, c’est l’ouverture parfaite de cette enquête : cette cravate pose d’emblée la question du prix au-delà de toute rationalité.
- Symbole de la dérive possible du luxe :
- Elle cristallise le message “on peut techniquement rendre infini le prix d’un accessoire”.
Inconvénients
- Inportable dans la vraie vie :
- Poids, valeur, sécurité : personne ne va porter ça au bureau ou à un mariage normal.
- C’est un objet d’exposition, pas un outil de style quotidien.
- Aucune logique qualité/prix :
- On ne peut pas parler de “rapport qualité/prix” ici : c’est une œuvre de communication, pas une cravate fonctionnelle.
- Le prix ne reflète pas une qualité textile supérieure, mais la quantité de pierres précieuses.
- Pour un guide d’achat, cette cravate reste un cas extrême : elle est passionnante à analyser, mais totalement hors champ pour vos choix réels.
Cotation (sur 10)
- Engagement symbolique / storytelling luxe : 10/10
- Rapport “fonction / prix” : 1/10
- Innovation conceptuelle (cravate = joaillerie) : 9/10
Moyenne : 6,7/10
En clair :
- Comme œuvre de communication → chef-d’œuvre stratégique.
- Comme cravate pour un homme qui s’habille → aberration absolue.
2. HexTie / Faraon 18K – La cravate armure à 31 000 $

L’histoire de la Faraon 18K de HexTie n’est pas celle d’un tailleur traditionnel, mais d’un designer qui a décidé de hacker complètement le concept même de cravate. HexTie, marque new-yorkaise fondée par Enrique Alejandro Peral, s’est d’abord fait connaître par ses cravates en polymères rigides et articulés, à mi-chemin entre l’accessoire de mode et l’armure futuriste. On est loin des ateliers de soie lyonnais ou napolitains : ici, la base, c’est la plaque, pas le tissu.
Dans cet univers déjà décalé, la Faraon 18K représente le sommet – ou la caricature, selon votre sensibilité. Présentée comme la première cravate en titane plaqué or 18 carats au monde, elle est proposée à un prix d’environ 31 000 $. Là où Satya Paul empile les diamants sur une base de soie, HexTie change carrément de registre : la cravate devient un objet rigide, architecturé, plus proche du bijou high-tech que du textile. Honnêtement, on n’est plus dans le registre de l’élégance, mais dans celui de la démonstration.
Ce qui m’intéresse dans ce cas, ce n’est pas seulement le prix, mais l’intention : HexTie ne cherche pas à sublimer la cravate classique, il cherche à la muter, quitte à la rendre presque inutilisable dans la vraie vie. On ne parle plus de drapé, de tombé, de dimple. On parle de plaques, de reflets métalliques, de lumière qui accroche chaque segment. Sur un plan symbolique, la Faraon 18K, c’est l’idée de pouvoir blindé : un torse en costume prolongé par une cravate quasi cuirassée. À vous de décider si vous trouvez ça visionnaire… ou simplement grotesque.
Spécifications techniques
Produit iconique : Cravate Faraon 18K Luxury Tie (pièce ultra-limitée)
Matières principales
- Base structurelle :
- Titane (structure rigide principale)
- Finition :
- Plaquage or 18 carats sur l’ensemble des éléments, ce qui lui vaut son statut de cravate plaquée or
- Liaison :
- Éléments rigides reliés entre eux par une trame textile ou flexible (selon le système HexTie standard, qui mélange deux polymères rigides et un tissu souple)
Construction
- Chaque “maillon” de la cravate est une pièce rigide, découpée puis assemblée à la main – on est plus proche d’un collier articulé que d’un ruban de soie.
- La face visible est intégralement recouverte de plaquage or 18K, créant un effet de surface dorée fragmentée.
- L’ensemble est articulé pour suivre à peu près les mouvements du corps, mais reste fondamentalement rigide.
Origine & contexte
- Design : HexTie / Enrique Alejandro Peral, New York
- Positionnement : cravate statement, pièce d’exception dans une gamme déjà très audacieuse (or, polymères, look futuriste).
- Narratif : “world’s first handmade titanium 18K gold plated tie” – la première cravate en titane plaqué or 18 K au monde.
Prix
Prix annoncé :
- Faraon 18K Luxury Tie : 31 000 $
Dans la hiérarchie de mon enquête, elle se place juste en dessous de Satya Paul (≈ 220 000 $), mais au-dessus des cravates joaillières de Stefano Ricci (~ 30 000 $).
À noter :
- Les autres cravates HexTie en polymères dorés / métallisés se situent généralement entre 1 000 et 1 598 $, déjà très haut pour un accessoire non textile.
Avis
Comme pour Satya Paul, on n’est pas dans le terrain des “avis clients” classiques, mais plutôt dans celui :
- des articles de blog (notamment HexTie eux-mêmes, MyTour, listes “most expensive ties”),
- de la presse spécialisée luxe / mode masculine,
- des vidéos YouTube présentant la cravate comme “most expensive tie”.
Ce qui ressort :
Fascination
- Cravate perçue comme un objet-spectacle : les mots “insane”, “crazy tie”, “armour” reviennent souvent.
- Beaucoup saluent l’audace du design : personne d’autre ne propose une telle cravate “métallique”.
Incrédulité / confusion
- “Peut-on encore appeler ça une cravate ?”
- Les puristes du sartorial voient un gadget bling plutôt qu’un accessoire d’élégance.
Lecture stratégique
- En termes de storytelling, HexTie réussit un coup similaire à Satya Paul, mais sur un autre terrain :
- non pas l’orfèvrerie traditionnelle, mais le design futuriste + or 18K.
- La marque se positionne ainsi comme le hacker du dress code : celui qui t’offre l’objet pour casser complètement les conventions.
Si je devais traduire ça en notation “avis” :
- 5/5 en impact visuel / conversation piece,
- 4/5 en cohérence avec le concept HexTie (innovation, prise de risque),
- 1/5 en portabilité réelle / confort.
On tourne autour de 3,3–3,5/5 selon le prisme.
Avantages
Signal maximal
- C’est une cravate qui n’a aucun équivalent en environnement classique : elle monopolise instantanément le regard.
- Pour une performance, un clip, un shooting mode ou un événement très spécifique, c’est un objet qui garantit le “moment”.
Innovation formelle
- HexTie ne se contente pas de plaquer de l’or sur une cravate classique : il réinvente la forme en modules rigides articulés.
- En termes de design produit, c’est un cas d’école intéressant : la cravate n’est plus un ruban de tissu à nouer, mais un objet 3D quasi sculptural. Reste à savoir si vous pouvez encore l’appeler cravate… ou si l’on a basculé dans le gadget de luxe.
Rareté assumée
- Non produite en masse, assemblée à la main, destinée à une micro-niche.
- Pour un collectionneur, un artiste ou un performer, la Faraon 18K est un artefact plus qu’un vêtement.
Inconvénients
Inconfort et portabilité limitée
- Poids, rigidité, bruit potentiel des segments : on s’éloigne radicalement de la gestuelle naturelle d’une cravate en soie.
- Improbable au bureau, compliqué même en soirée “normale” : c’est un costume de scène.
Rapport fonction / prix
- Pour 31 000 $, on pourrait acheter :
- une garde-robe complète de cravates artisanales de haut niveau,
- plusieurs costumes sur-mesure,
- ou une pièce de joaillerie plus polyvalente.
- Sur l’axe “utilité concrète”, la note est forcément basse.
Lisibilité stylistique
- Dans un cadre sartorial classique, la Faraon 18K est perçue comme hors-jeu : trop éloignée des codes du tailoring.
- Elle colle davantage à un univers “mode, spectacle, rap, clip vidéo” qu’à celui de l’élégance intemporelle.
Cotation (sur 10)
- Engagement symbolique / storytelling futuriste : 9/10
- Rapport “fonction / prix” : 2/10
- Innovation conceptuelle (cravate = objet armure / bijou high-tech) : 9/10
Moyenne : 6,7/10
Comme pour Satya Paul, on est face à une cravate-manifeste, mais cette fois dans une esthétique cyber-luxe.
En langage simple :
- Comme pièce de design / objet de scène → fascinante.
- Comme cravate pour un homme qui s’habille au quotidien → totalement impraticable.
3. Stefano Ricci – La cravate-bijou des ultra-riches

L’univers de Stefano Ricci, c’est celui des salons feutrés de Florence, des suites d’hôtels à Dubaï et des dressings où un simple cintre vaut plus cher qu’un costume prêt-à-porter. Fondée dans les années 1970, la maison italienne s’est spécialisée dans un luxe masculin ostentatoire mais ultra-codé : costumes, chemises, maroquinerie… et cravates.
Là où la plupart des marques se contentent d’une belle soie, Stefano Ricci pousse la logique plus loin : certaines de ses cravates sont de véritables pièces de joaillerie, serties de milliers de cristaux Swarovski, voire de pierres précieuses. Dans plusieurs classements internationaux, une de ses créations atteint 30 000 $, ce qui fait de Stefano Ricci l’une des rares maisons, avec Satya Paul et HexTie, à avoir franchi ce seuil symbolique.
Ce qui m’intéresse ici, c’est ce mélange de savoir-faire textile italien et de logique bijoutière. La cravate n’est plus seulement un signe de style : elle devient un révélateur de statut pour des clients qui vivent dans un monde où une cravate à 300 € n’est qu’un basique.
Spécifications techniques
Produit iconique : cravate en satin de soie sertie de cristaux / diamants (pièces ultra-limitées).
- Matières principales
- Base : satin de soie 100 %, très dense, au toucher lisse et brillant.
- Ornements :
- Cristaux Swarovski en grand nombre sur les modèles “Formal Crystal”,
- Pierres précieuses ou diamants sur certaines pièces de collection très rares.
- Construction
- Cravate coupée dans le biais pour conserver un tombé fluide malgré le poids des ornements.
- Entoilage renforcé pour supporter les milliers de cristaux.
- Pose manuelle des cristaux / pierres, un par un, suivant un motif géométrique ou héraldique.
- Finitions main (bords, pointe, couture glissante) dans la tradition de la cravate de luxe italienne.
- Origine & contexte
- Design et fabrication : Italie (Florence et ateliers partenaires).
- Positionnement : pièces destinées à une clientèle “top percentile” (HNWI, dirigeants, clientèle du Golfe, cercle très restreint).
Prix
On peut distinguer deux niveaux dans l’offre Stefano Ricci :
- Cravates en soie “classiques” de luxe :
- Généralement au-dessus de 200–300 € pour les modèles sans cristaux (mais déjà très haut de gamme).
- Cravates joaillières (cristaux, diamants) :
- Certaines pièces emblématiques sont référencées autour de 25 000–30 000 $ selon les sources et les éditions.
- Elles se situent immédiatement sous les records de Satya Paul et d’HexTie, tout en restant dans une esthétique plus proche de la cravate traditionnelle (contrairement à la Faraon rigide de HexTie).
Avis
On ne trouve évidemment pas de commentaires “taille petit” ou “couleur différente de la photo” sur ce type de produit. Les retours viennent davantage :
- de la presse luxe / mode masculine,
- des conseillers en image travaillant avec des clients très fortunés,
- des rares échanges entre passionnés de sartorial qui ont pu voir ou manipuler ces pièces.
Ce qui ressort :
- Appréciations positives
- Impression de pièce de collection : la cravate devient une sorte de trophée.
- Qualité de la soie et de la construction jugée excellente (même sur les lignes non joaillières).
- Pour la cible, la présence de cristaux / diamants est moins vue comme du bling pur que comme un signe d’appartenance à un club ultra-restreint.
- Critiques récurrentes
- Pour les amateurs d’élégance classique, Stefano Ricci est souvent considérée comme trop ostentatoire, limite kitsch sur certains modèles très chargés.
- Le rapport “prix/usage” est évidemment très faible : ces cravates ne sortent pas souvent du placard – ou du coffre.
- Du point de vue strictement textile, une excellente cravate artisanale napolitaine ou parisienne à 200–300 € peut offrir une expérience de port tout aussi satisfaisante, sans le cirque des cristaux.
Si je devais convertir ce ressenti en “note” façon agrégateur :
- 4,5/5 auprès de la cible naturelle (ultra-riches qui aiment l’affirmation de statut),
- 2,5/5 auprès des puristes sartoriaux (too much, trop cher, trop voyant).
On atterrit raisonnablement sur un 4/5 si l’on évalue la marque par rapport à son public réel.
Avantages
- Exclusivité maximale
- Les cravates joaillières Stefano Ricci sont produites en quantités infimes. En posséder une, c’est faire partie d’un club extrêmement réduit.
- Savoir-faire mixte textile / bijouterie
- Peu de maisons maîtrisent aussi bien cette fusion : conserver un vrai tombé de cravate tout en intégrant des centaines voire des milliers de cristaux.
- Puissance visuelle et statutaire
- Portée dans le bon contexte (soirée très haut de gamme, évènement “show-off”), une telle cravate écrase tout le reste de la tenue et envoie un message clair : “je joue dans une autre division”.
- Continuité de l’univers
- Pour un client déjà habillé en Stefano Ricci de la tête aux pieds, la cravate joaillière est le sommet logique de la panoplie.
Inconvénients
- Prix déconnecté de l’usage
- On passe d’un accessoire quotidien à un objet quasi cérémoniel : tu ne vas pas nouer une cravate à 30 000 $ pour une réunion Zoom.
- Difficile de justifier ce prix en dehors d’une logique de collection ou de démonstration de richesse.
- Style très polarisant
- Ce qui est perçu comme sublime par certains (luxe, éclat, opulence) sera vu comme vulgaire par d’autres (trop de brillance, surcharge visuelle).
- Rapport qualité/prix textile
- En isolant uniquement l’aspect soie / coupe / confort, une excellente cravate artisanale autour de 200–300 € fait largement le travail.
- Ce qui fait la différence ici, ce n’est plus la cravate… c’est la joaillerie.
Cotation (sur 10)
- Engagement “luxe extrême” : 9/10
- Rapport fonction / prix : 3/10
- Innovation dans la fusion cravate / bijou : 8/10
Moyenne : 6,7/10
Stefano Ricci, c’est pour moi la cravate-bijou des ultra-riches : techniquement impressionnante, statutairement explosive, économiquement absurde pour le commun des mortels. Dans ma descente du plus cher au plus “raisonnable”, c’est la marche qui relie les pièces totalement records (Satya Paul, HexTie) aux cravates de luxe “portables” comme Hermès, Charvet ou Brioni.
II. Cravates de luxe « portables » : le club des 200–250 €
Entre les cravates-record en diamants et les modèles grand public, il existe un palier stratégique : celui des cravates de luxe portables, autour de 200–250 €. C’est ici que jouent les maisons qui façonnent le goût mondial : Hermès, Charvet, Brioni.
À ce niveau, on n’achète plus seulement un bout de soie : on achète un écosystème de savoir-faire, une histoire, un capital symbolique. L’enjeu de ce chapitre est simple : comprendre pourquoi une cravate à 30 € et une cravate à 230 € racontent visuellement la même chose à un œil non entraîné… mais pas du tout la même chose aux milieux qui maîtrisent les codes (directions générales, cabinets d’avocats, diplomatie, luxe discret).
On retrouve ma grille d’analyse : environ 30 % de surcoût justifié par la matière et la construction, 70 % par la marque et l’aura. C’est aussi la zone de prix où se joue le dilemme central : payer la différence ou rester dans un milieu de gamme « malin ».
1. Hermès – L’alchimiste mondial de la soie imprimée

Hermès, c’est pour moi la cravate qui a réussi à devenir un langage à part entière. Quand vous entrez dans certains milieux – directions générales, cabinets d’avocats, cercles politiques – dire « il porte une Hermès » suffit à situer immédiatement le niveau de revenu, de culture et de réseau de la personne.
Née comme maison de sellerie, la marque a construit autour de Lyon une filière soie d’une cohérence rare : twill de soie 100 %, dessin des motifs, impression, confection main, chaque étape est pensée pour que la cravate ait un tombé, une main et une personnalité reconnaissables entre toutes. Ce qui m’intéresse particulièrement, ce sont les motifs : chevaux stylisés, scènes décalées, micro-imprimés ludiques… Une Hermès se repère sans logo, et c’est là que commence le jeu du pouvoir symbolique.
Pour environ 245 €, vous achetez à la fois une vraie densité textile et un signal social immédiat : une cravate Hermès raconte autant votre exigence de qualité que votre appartenance à un certain milieu. La maison s’appuie sur des décennies de travail sur la soie, une coupe dans le biais qui évite que la cravate ne vrille, et un tombé qui permet au nœud de former naturellement un beau creux. Bien entretenue, une Hermès peut vous accompagner dix à quinze ans sans perdre sa place dans votre vestiaire.
La critique que je formule dans ce reportage est simple : à niveau de soie comparable, certains artisans français ou italiens proposent des cravates moins chères, avec un geste tout aussi beau. Mais aucun d’entre eux, pour l’instant, n’a réussi à transformer la cravate en totem culturel mondial au même degré qu’Hermès.
- Produit iconique : cravate en twill de soie 100 %, 7–8 cm, faite main
- Prix indicatif 2025 : ~245 € pour les modèles classiques
- Matière : twill ou twill lourd de soie, tissé et imprimé en France
- Pays d’origine / fabrication : France (filière lyonnaise, confection main)
- Particularités : motifs narratifs, humour discret, reconnaissance instantanée dans certains milieux
- Avantages : tombé impeccable, dimple facile, forte valeur symbolique, longévité
- Inconvénients : prime de marque très élevée, motifs parfois difficiles en environnement ultra-sobre
- Statut 2025–2026 : collection constamment renouvelée, cravate Hermès = standard mondial de la cravate de luxe
2. Charvet – Le sanctuaire parisien du luxe discret

Charvet, fondée en 1838 et installée place Vendôme, joue à mes yeux dans une catégorie bien à part : là où Hermès s’affiche via le motif, Charvet s’impose par le silence et la nuance.
Historiquement première grande maison de chemiserie, la marque a construit sa réputation sur une obsession textile : des milliers de références de tissus, des variations infinies d’armures et de couleurs, et, dans le même esprit, des cravates en soie à la fois denses et subtiles. Dès environ 215 €, vous accédez à des cravates en grenadine, en twill ou en jacquard dont la main est immédiatement différente de la plupart des produits industriels. Ici, pas de gros monogrammes ni de dessin “rigolo” : tout se joue dans la profondeur de la couleur, le micro-motif, la façon dont la lumière glisse sur la soie.
L’expérience client tient du rituel : adresse mythique, conseil personnalisé, impression de pousser la porte d’un sanctuaire plutôt que d’une simple boutique. Charvet repose sur un bouche-à-oreille puissant qui, depuis des décennies, attire artistes, politiques et écrivains. Les critiques portent rarement sur la qualité – excellente – mais parfois sur un style jugé « trop classique » ou sur l’absence de logo facilement reconnaissable pour ceux qui cherchent la validation immédiate. Pour vous, Charvet représente le choix de l’initié : celui qui accepte de payer le luxe, mais refuse le côté ostentatoire des grandes marques grand public.
- Produit iconique : cravate en soie tissée (grenadine, jacquard, twill)
- Prix indicatif 2025 : à partir de ~215 € en boutique, plus selon tissus et séries
- Matière : 100 % soie, densité élevée, tissage complexe
- Pays d’origine / fabrication : France (Paris, circuits d’ateliers et tisseurs partenaires)
- Particularités : luxe discret, coloris et motifs d’une grande subtilité, adresse place Vendôme
- Avantages : crédibilité maximale chez les connaisseurs, qualité textile remarquable, intemporalité
- Inconvénients : peu de reconnaissance « logo » auprès du grand public, distribution limitée, univers très classique
- Statut 2025–2026 : maison indépendante, toujours référence absolue pour les amateurs de cravates et chemises sur mesure
3. Brioni – Le prolongement sartorial du costume de power player

Brioni, maison italienne fondée à Rome, est d’abord pour moi un tailleur de légende avant d’être un fabricant de cravates. Leurs cravates sont pensées comme le prolongement naturel de leurs costumes : silhouettes impeccables, drapés fluides, image de “power dresser” international.
Autour de 230 € pour une cravate essentielle en soie – parfois davantage pour des jacquards plus complexes – vous entrez dans un univers où chaque détail est calibré pour accompagner les revers généreux des vestes Brioni. Techniquement, on est sur des cravates 100 % soie, faites main en Italie, avec des entoilages pensés pour garder un tombé net et un nœud précis : c’est la cravate du PDG, de l’avocat star, du diplomate qui veut envoyer un signal d’excellence sans tomber dans le clin d’œil graphique à la Hermès.
Ce que j’observe, c’est qu’une partie du prix rémunère une très belle fabrication, mais qu’une part non négligeable paie aussi l’expérience globale de la maison : boutiques, service, sur-mesure, l’aura du nom Brioni. La force de la marque, ce n’est pas seulement la cravate isolée, c’est la cohérence d’ensemble : costume, chemise, cravate, attitude. Les critiques portent parfois sur un rapport qualité/prix jugé moins spectaculaire si vous n’achetez que la cravate, hors contexte du costume.
Pour vous, Brioni est la cravate à considérer si vous voulez vous inscrire visuellement dans le club des grands tailleurs italiens, sans rechercher l’excentricité ni le logo tape-à-l’œil, mais en assumant un positionnement très “haut de gamme institutionnel”.
Statut 2025–2026 : toujours référente dans le segment “costume + cravate” de très haut niveau, présence forte en boutique officielle et détaillants luxe
Produit iconique : cravate Essential en soie, 100 % soie, faite main en Italie
Prix indicatif 2025 : ~230–240 € pour les modèles essentiels, jusqu’à ~295 € pour certains jacquards
Matière : soie (twill, jacquard), parfois mélanges nobles dans certaines lignes
Pays d’origine / fabrication : Italie, confection artisanale
Particularités : cravate pensée pour accompagner le costume Brioni, image de power dressing discret
Avantages : très bonne qualité globale, cohérence parfaite avec un vestiaire tailleur haut de gamme, forte image auprès des élites
Inconvénients : rapport qualité/prix moins évident si on l’achète hors écosystème Brioni, style parfois jugé trop classique
Entre les records en diamants et les cravates de logo à 250 €, il existe un territoire que j’aime particulièrement : celui des artisans et maisons de connaisseurs. Ici, vous ne payez pas les campagnes d’affichage dans les aéroports, mais des ateliers, des tisseurs, des gestes précis. Les noms parlent moins au grand public, mais beaucoup à ceux qui vivent en costume toute la semaine. E. Marinella, Cinabre, Howard’s… Ce sont des marques que l’on croise plus souvent dans les garde-robes de passionnés que dans les vitrines de centre commercial. L’enjeu, pour vous, est simple : comprendre ce que vous gagnez – et ce que vous perdez – en quittant le luxe de logo pour ce luxe plus discret, parfois plus radical, toujours plus incarné.
III. Artisans & maisons de connaisseurs : les alternatives aux grands logos
Entre les records en diamants et les cravates de logo à 250 €, il existe un territoire que j’aime particulièrement : celui des artisans et maisons de connaisseurs. Ici, vous ne payez pas les campagnes d’affichage dans les aéroports, mais des ateliers, des tisseurs, des gestes précis. Les noms parlent moins au grand public, mais beaucoup à ceux qui vivent en costume toute la semaine. E. Marinella, Cinabre, Howard’s… Ce sont des marques que l’on croise plus souvent dans les garde-robes de passionnés que dans les vitrines de centre commercial. L’enjeu, pour vous, est simple : comprendre ce que vous gagnez – et ce que vous perdez – en quittant le luxe de logo pour ce luxe plus discret, parfois plus radical, toujours plus incarné.
1. E. Marinella – Naples, la cravate comme religion quotidienne
E. Marinella, c’est la petite boutique napolitaine qui a réussi à habiller des ministres, des diplomates et des obsédés du détail sans jamais devenir un “logo grand public”. Depuis Naples, la maison propose des cravates qui, à mes yeux, incarnent l’idée même de cravate italienne : couleurs vivantes, motifs serrés, tombé fluide. On est très loin du gadget : ici, la cravate est une habitude quotidienne, presque un uniforme. Pour 180 à 230 €, vous n’achetez pas un délire joaillier, mais une cravate en soie, souvent sept plis, coupée et cousue à la main, avec un vrai savoir-faire dans les proportions. Là où certaines grandes maisons misent sur la reconnaissance immédiate, Marinella joue la carte du connaisseur : ceux qui savent reconnaissent la cravate, les autres voient “juste” une belle soie. C’est d’ailleurs sa force comme sa limite. Si vous cherchez la validation instantanée du logo, passez votre chemin. Si vous cherchez une cravate qui fait le lien entre tradition napolitaine et usage intensif – réunions, voyages, journées entières nouée au cou – Marinella devient une candidate très sérieuse. Ma critique principale tient au style : certains motifs peuvent paraître très chargés ou datés à un œil habitué à l’épure. Mais c’est aussi ce qui fait son charme pour ceux qui aiment le vrai classicisme italien.
Inconvénients : style parfois chargé, faible reconnaissance auprès du grand public
Produit iconique : cravates en soie, souvent sept plis
Prix indicatif : ~180–230 €
Matière : soie (grenadine, twill, imprimés variés)
Pays d’origine / fabrication : Italie, Naples
Particularités : boutique culte, grand choix de motifs, réputation de référence chez les amateurs
Avantages : vrai savoir-faire, cravates pensées pour être portées souvent, image de connaisseur
2. Cinabre – Le made in France assumé, entre atelier et manifeste

Cinabre, c’est un peu l’anti-cravate de centre commercial. La marque fabrique ses cravates en France, dans un atelier du Loir-et-Cher, et revendique un positionnement clair : peu de volume, beaucoup de personnalité. Là où les grandes maisons internationales déclinent des centaines de références par saison, Cinabre travaille sur des séries plus courtes, souvent avec un propos esthétique fort. Pour environ 165 €, vous mettez autour de votre cou une cravate en grenadine de soie ou en soie imprimée qui porte à la fois l’empreinte d’un atelier et d’un directeur artistique. Ce qui m’intéresse chez Cinabre, c’est ce mélange entre codes classiques (grenadine, soies profondes) et touches plus créatives. La marque parle à ceux qui veulent du made in France réel, pas un simple argument marketing. Elle parle aussi à ceux qui en ont assez de voir les mêmes cravates dans toutes les grandes capitales européennes. Ma réserve : le style Cinabre est marqué. Si vous êtes très attaché à une discrétion totale, certains modèles risquent de vous paraître trop identitaires. Mais si vous voulez une cravate française, bien faite, avec une histoire et une gueule, Cinabre est une alternative très crédible à l’éternel duo Hermès / luxe italien.
Inconvénients : style parfois trop marqué pour les plus conservateurs, distribution plus confidentielle
Produit iconique : cravate en grenadine de soie
Prix indicatif : ~165 €
Matière : grenadine de soie, soies tissées ou imprimées
Pays d’origine / fabrication : France (Loir-et-Cher)
Particularités : atelier français, séries limitées, univers graphique affirmé
Avantages : fabrication locale, identité forte, vraie alternative aux grandes maisons
3. Howard’s – Le bon élève parisien du rapport qualité/prix

Howard’s (ou Howard’s Paris), c’est la marque que j’aime citer quand je veux montrer qu’on peut avoir une très bonne cravate sans franchir le cap des 200 €. On est ici dans un registre plus accessible que Marinella ou Hermès, mais avec un vrai souci de tissu et de construction. Les cravates tournent autour de la centaine d’euros, en soie, parfois en grenadine, avec des finitions propres et un choix de motifs suffisant pour couvrir la plupart des situations : bureau, mariage, rendez-vous important. Ce que j’apprécie, c’est ce positionnement intermédiaire : assez premium pour qu’on sente une différence nette par rapport à une cravate de fast fashion, assez raisonnable pour que vous puissiez en acheter plusieurs sans vous griller votre budget costume. Howard’s n’a pas l’aura mythique de Charvet ou la légende napolitaine de Marinella, mais joue une partition utile : celle du bon élève parisien qui permet à beaucoup d’hommes de faire un vrai bond en qualité sans basculer dans le luxe de logo. La critique est simple : les puristes trouveront toujours plus artisanal, plus pointu ailleurs ; et la marque n’a pas la reconnaissance symbolique d’Hermès. Mais si vous êtes à ce moment de votre parcours où vous voulez sortir du “cheap” sans entrer encore dans le “culte”, Howard’s est une étape très intelligente.
Inconvénients : moins iconique que les grandes maisons, moins artisanal que certaines marques de niche
Produit iconique : cravates en soie pour le bureau et les occasions formelles
Prix indicatif : un peu au-dessus de 100 €
Matière : soie (parfois grenadine ou mélanges adaptés à la saison)
Pays d’origine / fabrication : fabrication européenne avec ancrage parisien
Particularités : positionnement intermédiaire, choix de motifs adapté à un usage intensif
Avantages : très bon rapport qualité/prix, bonne porte d’entrée dans le “vrai” monde de la cravate
IV. DNVB & marques « smart buy » orientées web
Il y a un moment, dans un parcours de style masculin, où on se lasse des cravates à 19,99 € qui brillent trop et se tiennent mal, sans être prêt pour autant à mettre 200 € dans un bout de soie.
C’est là qu’entrent en scène les marques “smart buy”, souvent très présentes en ligne : elles promettent un vrai saut qualitatif, mais avec un discours rationnel sur le prix. Suitsupply, Charles Tyrwhitt, The Nines… Ce ne sont pas des maisons mythiques, mais elles habillent une génération entière de jeunes actifs, de consultants, de commerciaux, de cadres qui veulent être crédibles en réunion sans vendre un rein.
Mon regard est simple : je veux savoir ce que vous gagnez vraiment en montant à 40–80–100 €, et où commence la limite entre la bonne affaire et le marketing bien huilé.
1. Suitsupply – La rampe d’accès au costume (et à la cravate) sérieuse

Suitsupply, c’est un peu le “fast-track” vers le costume correct. La marque néerlandaise s’est fait connaître avec ses costumes d’un rapport qualité/prix agressif, et ses cravates suivent la même logique. Quand je regarde leur offre, je vois des cravates en soie, laine, lin ou mélanges, globalement bien coupées, avec des motifs qui vont du très classique (unies, petites rayures) au plus audacieux. On n’est pas dans l’artisanat romantique, mais dans l’outil : vous achetez une cravate pour accompagner un costume que vous allez porter au bureau, en rendez-vous client, en présentation importante.
Le gros avantage, c’est que pour une fraction du prix d’une cravate Hermès, vous pouvez vous constituer un petit parc de 4–5 cravates cohérentes, qui couvrent quasiment toutes les situations. Mon reproche ? On sent parfois une certaine standardisation : les textures manquent un peu de profondeur par rapport aux maisons plus haut de gamme, et la cravate raconte moins d’histoire. Mais si vous sortez de la fast fashion et que vous voulez quelque chose qui tienne enfin la route, Suitsupply est une rampe d’accès honnête et efficace.
- Produit typique : cravate en soie ou laine pour costume business
- Prix indicatif : souvent entre 40 et 80 € selon matière et collection
- Matières : soie, laine, lin, mélanges saisonniers
- Pays d’origine / fabrication : production principalement en Europe / Asie selon les lignes
- Particularités : pensée pour matcher avec les costumes de la marque, offre très lisible pour le business
- Avantages : bon rapport style/prix, choix large, idéal pour se constituer un premier dressing sérieux
- Inconvénients : peu de personnalité textile, pas de “magie” artisanale, risque de croiser la même cravate sur un collègue
2. Charles Tyrwhitt – Le tiroir à cravates du cadre pressé

Charles Tyrwhitt, c’est la marque anglaise que beaucoup de cadres découvrent après avoir tapé “chemise business” dans Google. Chemises, costumes, et évidemment cravates : tout est pensé pour habiller l’homme de bureau qui veut rester dans les clous. Ici, la stratégie est claire : beaucoup de choix, beaucoup de promos, et des cravates qui tournent autour de 30–50 € avec des offres du type “3 pour X €”.
Concrètement, vous obtenez des cravates en soie ou en mélanges, au style très pro : rayures classiques, petits motifs, unis sombres. On ne vous demandera jamais où vous avez acheté votre cravate, et c’est justement le but : être correct, propre, invisible.
Mon regard critique : pour ce prix, c’est honnête, mais vous ne ressentez pas le plaisir tactile d’une belle grenadine ou d’une soie très dense. La marque parle au salarié qui veut remplir son tiroir rapidement, pas au passionné de détail. Si vous débutez, c’est une solution pratique. Si vous avez déjà goûté à une vraie cravate artisanale, vous sentirez vite la différence.
- Produit typique : cravates en soie pour bureau / costume formel
- Prix indicatif : souvent 30–50 € pièce, moins en promo ou en pack
- Matières : soie, parfois mélanges (polyester incl.) sur certaines gammes
- Pays d’origine / fabrication : production externalisée, ancrage marque au Royaume-Uni
- Particularités : énorme catalogue, promos fréquentes, très orienté “business correct”
- Avantages : pratique, abordable, idéal pour garnir rapidement un tiroir à cravates
- Inconvénients : peu de caractère, qualité ressentie moyenne pour un œil habitué aux belles matières, risque de surconsommation “par lots”
3. The Nines – Le smart buy français qui fait le pont

The Nines, c’est la marque française que je cite souvent quand on me demande : “Je veux mieux que Zara, mais je ne suis pas prêt à mettre 200 € dans une cravate, je fais quoi ?”.
Ici, l’ADN, c’est l’accessoire : cravates, boutons de manchette, ceintures… et une vraie volonté de proposer une montée en gamme raisonnable. Les cravates en soie, grenadine, tricot ou lin tournent souvent autour de 40 à 80 €, avec des finitions propres, un choix de largeurs et de matières bien pensé.
Ce qui me plaît, c’est le ton : les fiches produits sont pédagogiques, on vous explique ce qu’est une grenadine, pourquoi la largeur a de l’importance, comment harmoniser avec un costume. Si vous souhaitez faire un saut qualitatif sans basculer dans le fétichisme des marques, The Nines est une excellente passerelle.
Ma réserve : on reste dans une logique industrielle améliorée, pas dans l’atelier de niche. Ne vous attendez pas à la même profondeur de tissu que chez un artisan italien ou français. Mais si vous venez de la fast fashion, la différence de tenue, de tombé et de finition sera déjà spectaculaire.
Inconvénients : pas aussi prestigieux ni artisanal qu’une maison spécialisée, image encore peu statutaire
Produit typique : cravate en grenadine de soie ou soie classique
Prix indicatif : environ 40–80 € selon matière et gamme
Matières : soie, grenadine de soie, tricot de soie, lin, laine légère
Pays d’origine / fabrication : fabrication européenne / asiatique selon les gammes
Particularités : marque française, site très pédagogique, large choix de styles
Avantages : excellente porte d’entrée vers le “vrai” accessoire, bon rapport qualité/prix, choix cohérent
V. Marques grand public exigeant : sortir du cheap sans se ruiner
Je termine cette descente par ce que j’appelle le “plancher correct” : ces marques grand public qui ne font pas rêver les collectionneurs, mais qui évitent au moins l’effet cravate plastique qui brille sous les néons. Uniqlo, Massimo Dutti, Marks & Spencer… Ce sont souvent les premiers noms que vous croisez quand vous devez acheter une cravate en urgence pour un entretien, un mariage ou votre tout premier job.
Mon regard ici est volontairement froid : je veux mesurer ce que vous obtenez vraiment pour 20, 30 ou 40 €, et où s’arrête le “suffisamment correct” pour laisser la place aux cravates qui racontent autre chose que “j’ai fait ce que j’ai pu”.
1. Uniqlo – Le strict minimum propre

Uniqlo, c’est la version japonaise du basique rationnel. Quand on regarde leurs cravates, on comprend vite le contrat : des modèles simples, unis ou à petits motifs, très abordables, pensés pour accompagner un costume acheté à la va-vite. C’est la cravate que vous prenez parce qu’il “en faut une”, pas parce que vous aimez particulièrement cet objet.
Les matières oscillent entre polyester, mélanges et parfois un peu de soie ; le rendu est propre de loin, mais manque de profondeur de près. Le toucher confirme ce que le prix annonçait : ça fait le job, sans plaisir particulier à nouer ni à porter. Là où Uniqlo est intéressant, c’est pour le tout début du parcours : l’étudiant, le jeune diplômé fauché, celui qui a besoin de cocher la case “cravate” sans pouvoir investir.
Ma critique est claire : si vous restez à ce niveau trop longtemps, vous risquez d’associer la cravate à une contrainte, jamais à un plaisir. Et c’est dommage, parce qu’une belle cravate change complètement la façon dont vous vivez le costume.
- Produit typique : cravates unies ou à micro-motifs, coupe standard
- Prix indicatif : souvent entre 15 et 30 €
- Matières : polyester, mélanges, un peu de soie sur certaines séries
- Cible : étudiants, premiers jobs, achats d’urgence
- Avantages : prix imbattable, disponibilité, look propre “de loin”
- Inconvénients : toucher limité, tombé moyen, aucune valeur symbolique ni plaisir particulier
2. Massimo Dutti – Le costume de galerie commerçante

Massimo Dutti, c’est le versant “bourgeois chic” du groupe Inditex. Les cravates suivent la même logique : visuellement, c’est propre, souvent plus élégant que la moyenne de la fast fashion, avec des couleurs et motifs calibrés pour le bureau et les dîners en ville. On trouve davantage de soie que chez Uniqlo, des motifs qui imitent parfois le langage des grandes maisons, mais la main du tissu et les finitions rappellent que l’on reste dans un univers industriel.
Ce que j’observe, c’est que Massimo Dutti sert très bien de sas : vous passez de la cravate “cheap qui brille” à une cravate qui tient mieux, qui tombe mieux, sans encore assumer le prix psychologique d’une cravate à plus de 100 €. Je reste pourtant réservé : les cravates Massimo Dutti sont pensées pour être compatibles avec le plus grand nombre, pas pour affirmer une personnalité.
Si vous aimez les codes lisses des bureaux internationaux et que votre budget est serré, pourquoi pas. Mais si vous commencez à vous intéresser vraiment à la qualité des matières, aux textures, au plaisir tactile, vous allez vite sentir le plafond.
- Produit typique : cravate en soie ou mélange soie/synthétique, style business chic
- Prix indicatif : autour de 35–50 €
- Matières : soie, mélanges avec fibres synthétiques selon les modèles
- Cible : jeunes cadres, urbains “smart casual”
- Avantages : plus élégant que la fast fashion basique, bon compromis visuel à petit budget
- Inconvénients : standardisation forte, peu de profondeur textile, ne rivalise pas avec de vraies maisons d’accessoires
3. Marks & Spencer – La baseline britannique
Marks & Spencer, c’est le grand magasin britannique qui habille des générations entières. Côté cravates, on trouve un peu de tout : des modèles 100 % soie, des mélanges, des motifs classiques de bureau, du rayé, du uni, du faux régimental. L’intérêt, clairement, c’est le rapport praticité / prix : vous pouvez acheter une cravate correcte à 25–40 €, parfois en lot, et repartir avec quelque chose de tout à fait acceptable pour un environnement professionnel standard.
Pour moi, M&S représente la baseline : le niveau à partir duquel il devient intéressant de comparer. En dessous, on tombe vite dans le brillant plastique et le nœud qui ne tient pas. Au-dessus, on commence à parler main de la soie, densité, artisanat. Si vous vivez au Royaume-Uni ou que vous passez par là, c’est une adresse utile pour quelqu’un qui ne veut pas se ruiner et qui a besoin de plusieurs cravates fonctionnelles. Mais là encore, ne confondez pas : une cravate Marks & Spencer vous rend présentable, elle ne raconte pas une histoire particulière. Elle vous met au standard, pas au-dessus.
- Produit typique : cravate business en soie ou mélange, motifs classiques
- Prix indicatif : environ 25–40 € selon matière et ligne
- Matières : soie, mélanges, parfois polyester selon les gammes
- Cible : grand public, employés de bureau, clientèle fidèle de la marque
- Avantages : bon niveau de “propreté visuelle”, prix contenus, assortiment large
- Inconvénients : peu de personnalité, qualité honnête mais sans émotion, aucune valeur statutaire particulière
Si vous regardez ce dernier chapitre avec un peu de recul, vous voyez se dessiner une vérité simple : entre une cravate Uniqlo à 20 € et une Hermès à 245 €, il n’y a pas qu’un écart de prix. Il y a un écart de plaisir, de langage et de positionnement.
À vous de décider à quel niveau vous voulez vous situer – et combien vous êtes prêt à payer pour que votre cravate raconte autre chose qu’un achat de dernière minute.
VI. Comment lire une cravate comme un initié

À ce stade, vous avez vu des cravates à 20 €, 200 € et 200 000 €. La vraie question devient : comment les lire, concrètement, quand vous en tenez une en main ou que vous en voyez une autour d’un cou ? Je voudrais vous donner quelques réflexes simples, ceux que j’utilise instinctivement quand j’analyse une cravate.
D’abord, je regarde la matière. Une soie de bonne qualité n’a pas le même reflet qu’un polyester déguisé. La brillance trop “plastique”, c’est souvent mauvais signe. Une soie intéressante a de la profondeur, un léger grain, elle accroche la lumière sans saturer. Ensuite, je touche. Une cravate trop molle ou trop cartonneuse va mal vieillir, mal se nouer. Une bonne cravate a un corps : elle se laisse plier, mais reprend sa forme.
Je regarde aussi l’envers. Est-ce qu’on voit une couture glissante au milieu ? Est-ce que la pointe est bien nette ? Est-ce que le tissu rentre proprement dans le pan ? C’est là que se trahissent les économies industrielles. Enfin, je fais un test simple : je noue la cravate (ou je l’imagine nouée). Est-ce qu’elle permet de former facilement ce fameux petit creux sous le nœud ? Est-ce qu’elle tombe droit, sans vriller ?
Visuellement, je m’interroge toujours : qu’est-ce que cette cravate raconte ? Est-ce qu’elle essaie d’en mettre plein la vue ou est-ce qu’elle accompagne le costume ? Est-ce qu’elle vous survit, ou est-ce qu’on ne voit plus que ça ? C’est là que se joue l’élégance : une cravate réussie vous rend plus intéressant, pas juste plus bruyant.
VII. Quel niveau de cravate pour quel type d’homme ?

Après avoir passé en revue toutes ces marques, je sais qu’une question tourne dans votre tête : “Et moi, je me situe où là-dedans ?” Je vais être franc : tout le monde n’a pas besoin d’une cravate Hermès, ni d’une Marinella, ni même d’une cravate de marque, point.
Si vous êtes étudiant ou tout début de carrière, votre priorité n’est pas la soie sept plis, mais de ne plus ressembler à un costume de communion. Une ou deux cravates propres chez Uniqlo, Marks & Spencer ou équivalent, puis un saut assez rapide vers une marque “smart buy” comme The Nines ou une bonne cravate en soie autour de 50–80 € me paraît une trajectoire saine.
Si vous êtes jeune cadre ou indépendant et que vous portez la cravate plusieurs fois par semaine, rester à l’infini sur du bas de gamme est une erreur : vous allez vous lasser. C’est là que les Suitsupply, Charles Tyrwhitt, Howard’s, voire une première Marinella ou Cinabre prennent tout leur sens. Vous commencez à sentir vraiment la différence de tombé, de confort, d’image.
Si vous êtes dirigeant, avocat, médecin reconnu, homme public, la cravate cesse d’être un simple accessoire pour devenir un signe de langage social. À ce niveau, avoir quelques Hermès, Charvet ou Brioni dans votre rotation n’est plus du caprice, c’est du code. Je ne vous dis pas de jeter vos cravates plus simples, je vous dis simplement que quelqu’un, quelque part, les lit.
Enfin, si vous êtes esthète, passionné, obsédé de l’habillement, vous savez déjà que la bonne question n’est pas “combien ça coûte ?” mais “qu’est-ce que ça dit de moi, de mon rapport aux choses ?”. C’est là que les artisans prennent le dessus : E. Marinella, Cinabre, certaines maisons italiennes ou françaises plus confidentielles. Vous ne payez plus seulement une marque, vous payez un geste, une fidélité, parfois une relation.
Au fond, cette enquête m’a confirmé une chose : la cravate est un révélateur. On peut l’utiliser comme une formalité ou comme un langage. À vous de choisir à quel niveau vous voulez la parler.
VIII. Comment constituer une garde-robe de cravates intelligente

À ce stade, la tentation est grande de tout vouloir : une Hermès, une Charvet, une Marinella, un Cinabre, quelques “smart buy”, deux ou trois cravates de circonstance… C’est la meilleure façon de se perdre. Je préfère raisonner en garde-robe intelligente, par niveaux d’usage et de budget, plutôt qu’en accumulation.
Si vous partez de zéro, l’objectif n’est pas d’avoir vingt cravates, mais cinq ou six très bien choisies. Par exemple :
- une unie sombre (bleu nuit ou anthracite) pour les rendez-vous sérieux,
- une grenadine de soie bleu moyen ou bordeaux pour donner du relief sans être trop voyant,
- une cravate à petits motifs (pois, micro-motifs) pour alléger un costume formel,
- une cravate plus texturée (laine, cachemire, lin selon la saison) pour les tenues décontractées en veste,
- éventuellement une cravate plus “signature” si vous assumez un motif fort.
Ensuite, je répartis par segments de prix. Une base peut être composée de 2–3 cravates autour de 40–80 € (The Nines, Howard’s, Charles Tyrwhitt bien choisies), puis de 2–3 cravates de maisons plus pointues (une Marinella, une Cinabre, une Hermès ou une Charvet si votre budget le permet). L’idée n’est pas de brûler les étapes, mais de monter en gamme là où cela change vraiment votre plaisir et votre image.
Une garde-robe intelligente, c’est aussi une garde-robe qui respecte votre réalité : si vous portez une cravate une fois par mois, une belle cravate bien choisie vaut mieux qu’un tiroir plein de modèles médiocres. Si vous en portez tous les jours, la rotation devient essentielle : mieux vaut six cravates de bonne qualité qui tournent que deux cravates de luxe rincées au bout d’un an.
Ce qui compte, au fond, ce n’est pas le nombre, mais la cohérence : des cravates qui parlent la même langue que vos costumes, vos chemises, votre métier et votre tempérament.
IX. Où acheter : boutique, en ligne, vintage… et pièges à éviter

Je sais que beaucoup d’entre vous n’ont pas une boutique Charvet ou une adresse napolitaine au coin de la rue. Alors où acheter sans se faire piéger ?
En boutique physique, on paie rarement seulement la cravate. On paie le conseil, l’essayage, le droit de toucher, de comparer, de nouer. Dans une maison de luxe ou chez un bon détaillant, cela a du sens : voir la différence de soie, de couleurs, de tombé vaut plus que tous les discours. La contrepartie, c’est la pression douce du vendeur et le risque d’acheter plus cher que ce dont vous avez réellement besoin.
En ligne, on gagne en choix, en transparence sur les prix, en possibilité de comparer. Mais on perd le toucher, la nuance réelle des couleurs, le test du nœud. Mon conseil est simple : si vous débutez, commencez avec des marques honnêtes et pédagogiques, qui expliquent leurs matières, leurs largeurs, leurs lieux de fabrication. Évitez les “marques” qui sortent de nulle part avec des remises perpétuelles de -70 % et des discours grandiloquents sur le “luxe accessible” sans jamais dire où ni comment c’est fabriqué.
Le vintage et la seconde main peuvent être des mines d’or… comme des poubelles à ciel ouvert. On y trouve des Hermès, des Charvet, des cravates de grandes maisons à des prix ridicules, mais il faut un œil : vérifier l’état de la soie (taches, trame brûlée au repassage, plis cassés), l’absence de vilaines déformations au niveau du nœud, l’odeur (une cravate qui sent le grenier, ce n’est pas seulement une figure de style). Ce n’est pas le canal le plus simple pour débuter, mais c’est très intéressant quand on a un peu de bouteille.
Le vrai piège, quel que soit le canal, ce sont les cravates qui surpromettent : “soie italienne d’exception” à 19,90 €, “luxe ultime” vendu comme des packs de chaussettes. Une cravate honnête n’a pas besoin de vous hurler dessus. Une bonne cravate se reconnaît en la touchant, en la nouant, pas dans un slogan.
X. Faire durer une cravate de luxe : le test le plus honnête

Une cravate raconte aussi quelque chose à travers sa façon de vieillir. Une cravate Hermès, Charvet, Marinella ou Cinabre qui a dix ans et qui a conservé son tombé, ses couleurs, sa tenue, c’est un argument plus fort que n’importe quel discours marketing. Encore faut-il l’aider un peu.
D’abord, une évidence que beaucoup ignorent : on ne repasse pas une cravate comme une chemise. La chaleur mal maîtrisée peut brûler la soie, aplatir le relief, marquer définitivement la trame. Si vous devez vraiment la défroisser, un passage rapide à la vapeur (sans écraser le tissu) ou simplement la laisser pendue dans une salle de bain après une douche chaude suffit souvent à détendre les plis.
Ensuite, il y a la façon de la défaire. Arrachée à la fin de la journée, tirée comme une corde, une cravate se venge tôt ou tard : elle se déforme, se vrille, perd sa symétrie. Prendre trente secondes pour la dénouer proprement, la lisser et la suspendre change beaucoup de choses sur dix ans.
Le rangement compte aussi : une cravate roulée trop serrée dans un tiroir finira par garder la mémoire de cette roulade. Une cravate suspendue trop près d’une fenêtre va se délaver d’un côté. L’ennemi, ce sont les plis nets et la lumière directe. L’idéal : les suspendre ou les rouler doucement, sans compresser, et les garder à l’abri des UV.
Enfin, il y a l’usage : une cravate de soie très fine, très claire, n’est pas faite pour les déjeuners à risque ou les journées d’enchaînement. Acceptez que certaines cravates soient plus fragiles que d’autres. Porter toujours la même est le meilleur moyen de l’user prématurément. Une rotation sensée, c’est aussi ça : protéger vos meilleures cravates en les intégrant dans un rythme qui les respecte.
Si une cravate à 200 € tient dix ou quinze ans, alors son “prix réel” par port devient beaucoup plus raisonnable. C’est peut-être là, finalement, que se niche le seul vrai calcul intéressant dans cette histoire.
XI. Conclusion – La cravate comme révélateur, pas comme fétiche

En commençant cette enquête, je voulais répondre à une question simple : jusqu’où peut-on aller pour un accessoire qui se noue et se dénoue en quelques secondes ? À l’arrivée, la cravate à 189 190 € de Satya Paul, la Faraon 18K de HexTie ou les pièces joaillières de Stefano Ricci m’ont donné une réponse brutale : techniquement, on peut aller jusqu’à l’absurde. On peut transformer une bande de soie en bijou, en totem, en record pour le livre des “plus chers du monde”.
Mais ce que je retiens surtout, ce n’est pas l’excès. C’est la zone centrale : ces cravates entre 100 et 250 € qui, elles, se nouent vraiment le matin avant une plaidoirie, une réunion avec le conseil d’administration, un entretien décisif. Chez Hermès, Charvet, Brioni, E. Marinella, Cinabre, Howard’s ou même chez quelques “smart buy” bien choisis, la cravate devient un langage. Elle dit comment vous vous situez : logo rassurant, artisan discret, bon élève malin ou client de galerie marchande.
Au fond, la cravate est un excellent test de sincérité. Si vous la voyez uniquement comme une laisse sociale, vous resterez au niveau du minimum syndical : la cravate d’Uniqlo ou de Marks & Spencer pour cocher une case. Si vous commencez à la voir comme un outil de précision, vous irez naturellement vers des matières plus belles, des gestes plus soignés, des maisons qui respectent votre intelligence. Vous n’avez pas besoin d’une cravate à 200 000 € pour ça. Vous avez besoin d’une cravate qui tombe bien, qui se noue bien, qui vous ressemble.
Je ne vous dirai pas quelle marque acheter. Ce n’est pas le rôle de ce reportage. Mon rôle, c’est d’avoir mis côte à côte la cravate-record en diamants et la cravate de bureau à 30 €, puis tout ce qu’il y a entre les deux, pour que vous puissiez décider en conscience. Si, après avoir lu ces pages, vous continuez à porter la même cravate en polyester brillant sans vous poser de questions, alors ce texte n’aura servi à rien.
Mais si, la prochaine fois que vous tenez une cravate entre vos doigts, vous prenez deux secondes pour sentir la matière, regarder le tombé, interroger le prix, vous serez déjà dans un autre rapport à cet accessoire. Et c’est peut-être là, finalement, la seule chose qui m’intéresse vraiment : que votre cravate ne soit plus un réflexe, mais un choix.
XII. Panorama des marques de cravates : du totem en diamants au smart buy malin
Pour vous aider à vous repérer dans cette jungle de soie, d’or, de logos et d’artisans, j’ai rassemblé dans ce tableau toutes les marques citées dans mon enquête, des cravates records à 200 000 € jusqu’aux options intelligentes pour un tiroir bien rempli sans se ruiner.
1. Records, pièces joaillières et expérimentales
| Catégorie | Marque | Pays | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Record absolu | Satya Paul / Suashish | Inde | €€€€ (189 190 € pièce unique) | Cravate en soie, or, diamants, objet-totem médiatique | Collectionneur, musée, vitrine de marque |
| Cravate-armure plaquée or | HexTie (Faraon 18K) | USA | €€€€ (~31 000 $) | Cravate rigide en titane plaqué or, look futuriste / armure | Artiste, performer, ultra-bling |
| Joaillerie extrême | Stefano Ricci | Italie | €€€€ (pièces à plusieurs dizaines de k€) | Cravates en soie serties de cristaux/diamants, ultra-ostentation | Ultra-riches, clientèle du Golfe, show-off |
| Expérimentation soie + or | EMPA (soie + or 24K) | Suisse | €€€€ (série limitée) | Cravate techno-luxe, fil d’or tissé dans la soie | Collectionneur, amateur d’objets techniques |
2. Grandes maisons de luxe “portables” (environ 150–300 €)
| Catégorie | Marque | Pays | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Luxe iconique | Hermès | France | €€€ | Cravate de soie culte, motifs narratifs, symbole de statut mondial | Dirigeants, avocats, élites culturelles |
| Luxe discret absolu | Charvet | France | €€€ | Maison place Vendôme, soies denses, nuances subtiles, culte des connaisseurs | Esthètes, diplomates, amateurs de luxe discret |
| Tailleur de légende | Brioni | Italie | €€€–€€€€ | Cravate prolongement du costume de power player, très institutionnel | PDG, avocats stars, clientèle costume haut de gamme |
| Costume + cravate luxe | Zegna | Italie | €€€ | Style business chic italien, cravate dans un ensemble costume global | Cadres supérieurs, consultants, dirigeants |
| Sartorial ultra-luxe | Kiton | Italie | €€€–€€€€ | Cravates souvent sept plis, ultra luxe napolitain, parfois un peu old school | Collectionneurs de tailoring |
| Luxe couture | Tom Ford | USA/Italie | €€€ | Cravate large, dramatique, très cinématographique | Homme qui veut un style “personnage principal” |
| Luxe logo | Gucci | Italie | €€€ | Cravates en soie avec codes GG, image mode / logo fort | Amateurs de marques visibles |
| Luxe fashion | Dolce & Gabbana | Italie | €€€ | Cravates baroques, imprimés forts | Esthètes flamboyants, monde de la nuit |
| Luxe fashion | Versace | Italie | €€€ | Cravates très identitaires, motifs Medusa, or, baroque | Style très affirmé, amateurs de look statement |
| Luxe italien classique | Salvatore Ferragamo | Italie | €€€ | Cravates de soie avec petits motifs gancini, couleurs vives | Cadres, professions libérales, style italien chic |
| Luxe maison de mode | Louis Vuitton | France | €€€ | Cravates monogramme, image de luxe global, logo statutaire | Clientèle LV, amateurs de marque “universelle” |
| Luxe couture | Dior | France | €€€ | Cravates discrètes, couture parisienne, finitions propres | Amateurs de luxe discret lié à la haute couture |
| Luxe couture | Valentino | Italie | €€€ | Cravates classiques, parfois accent “rouge Valentino” | Esthètes italiens, costumes formels |
| Luxe couture | Giorgio Armani | Italie | €€€ | Cravates épurées, sobres, silhouette Armani | Partisans du minimalisme chic |
| Luxe couture | Prada | Italie | €€€ | Cravates au design moderne, touches graphiques contemporaines | Urbains pointus, créatifs |
| Purple label luxe | Ralph Lauren Purple Label | USA/Italie | €€€ | Ligne la plus luxe de Ralph Lauren, cravates en soie/cachemire | Gentleman “old money” stylisé |
| Maison brit’ haut de gamme | Alexander McQueen | UK/Italie | €€€ | Cravates avec motifs crâne, gothiques chic | Esthétiques rock, modeux, créatifs |
| Couture parisienne | Givenchy | France | €€€ | Cravates jacquard, style graphique et moderne | Urbains élégants, cadres mode |
3. Artisans & maisons de connaisseurs
| Catégorie | Marque | Pays | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Artisan napolitain | E. Marinella | Italie | €€€ | Cravate culte de Naples, sept plis, motifs classiques | Diplomates, amateurs de sartorial italien |
| Artisan français | Cinabre | France | €€–€€€ | Atelier français, grenadine de soie, univers graphique marqué | Amateurs de made in France créatif |
| Chemisier UK | Turnbull & Asser | UK | €€–€€€ | Fournisseur royal, cravates classiques britanniques faites main | Gentlemen, amateurs de style britannique |
| Marque UK de connaisseurs | Drake’s | UK | €€€ | Cravates faites main à Londres, tissus riches | Passionnés de menswear, amateurs de belles matières |
| Artisan / semi-artisan | Howard’s | France | €€ | Cravates de bonne qualité, positionnement intermédiaire parisien | Cadres exigeants, montée en gamme sans logo |
| Chemisier / accessoiriste | Paul Smith | UK | €€ | Cravates avec touches colorées signature, twist britannique | Créatifs, urbains stylés |
| Tailleur / accessoiriste | Canali | Italie | €€€ | Cravates sartoriales italiennes, élégance business | Cadres en costume, amateurs d’italianité classique |
| Maison brit’ élégante | Dunhill | UK | €€€ | Cravates luxe sobre, image gentleman londonien | Homme d’affaires conservateur |
4. DNVB & “smart buy” orientées web
| Catégorie | Marque | Pays | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Smart buy FR | The Nines | France | €–€€ | E-commerce d’accessoires, cravates en soie / grenadine pédagogiques | Jeunes actifs, montée en gamme raisonnable |
| Smart buy EU | Suitsupply | Pays-Bas | €–€€ | Marque costume + cravate, bon rapport qualité/prix business | Jeunes cadres, consultants, commerciaux |
| Smart buy UK | Charles Tyrwhitt | UK | €–€€ | Chemises + cravates business, gros volume, promos fréquentes | Cadres pressés, tiroir à cravates à remplir |
| Smart buy US/FR | Brooks Brothers | USA | €–€€ | Cravate preppy américaine, soie repp, classique universitaire | Professions libérales, amateurs de style preppy |
5. Marques grand public “exigeant” / entrée de gamme
| Catégorie | Marque | Pays (origine marque) | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Basique rationnel | Uniqlo | Japon | € | Cravates propres, simples, souvent synthétiques | Étudiants, premiers jobs, achat d’urgence |
| Fast-fashion chic | Massimo Dutti | Espagne (Inditex) | €–€€ | Cravate de galerie commerçante, plus chic que la moyenne | Jeunes urbains, budget serré |
| Grand magasin UK | Marks & Spencer | UK | €–€€ | Cravate “baseline” correcte pour bureau | Employés de bureau, grand public |
6. Grandes maisons mode / luxe mentionnées mais non détaillées dans le reportage
| Catégorie | Marque | Pays | Gamme de prix | Positionnement / image | Client type idéal |
|---|---|---|---|---|---|
| Couture française | Christian Lacroix | France | €€€ | Cravates colorées, très mode, image couture artistique | Esthètes, créatifs |
| Couture italienne | Roberto Cavalli | Italie | €€€ | Cravates en soie imprimée, style sexy / flamboyant | Amateurs de mode spectaculaire |
| Maison mode italienne | Salvatore Ferragamo | Italie | €€€ | Déjà cité plus haut, mais aussi segment mode / luxe |
FAQ
Q1. À partir de quel prix une cravate peut-elle être considérée comme “de luxe” ?
Je commence à parler de cravate “de luxe” autour de 150–200 €. En dessous, vous pouvez trouver de très bonnes cravates, mais au-dessus de ce seuil, vous payez généralement un mélange de meilleure soie, de construction plus soignée… et de capital de marque. Au-delà de 250 €, l’enjeu devient surtout symbolique.
Q2. Pourquoi certaines cravates coûtent plus de 200 000 € ?
Ces cravates ne sont plus vraiment des accessoires, mais des manifestes. On y ajoute or 24 carats, diamants, cristaux, travail joaillier. Vous payez un record, un storytelling, une pièce de collection, pas une cravate pour aller au bureau.
Q3. Une cravate Hermès vaut-elle réellement son prix ?
Vous payez une très belle soie, une filière textile française et un tombé impeccable. Mais vous payez aussi un signal social et un nom. Si vous avez le budget et que vous aimez l’idée de ce langage de marque, cela se défend. Sinon, des artisans comme Charvet, Marinella ou Cinabre proposent des alternatives tout aussi intéressantes sur le plan textile.
Q4. Que faut-il regarder en premier pour évaluer la qualité d’une cravate ?
Je regarde la matière, le toucher, la construction et le comportement au nœud. La soie ne doit pas briller comme du plastique, la cravate doit avoir du corps sans être rigide, la pointe doit être nette et le nœud doit pouvoir former facilement un joli creux.
Q5. Combien de cravates faut-il vraiment avoir dans un vestiaire masculin ?
Pour la plupart des hommes, cinq à sept cravates bien choisies suffisent largement : une unie sombre, une grenadine, une à petits motifs, une texturée pour l’hiver, une plus légère pour l’été, plus une ou deux cravates “signature” si vous aimez les motifs forts.
Q6. Comment choisir la bonne cravate pour mon mariage ?
Choisissez d’abord en fonction de votre costume : sur un bleu ou un gris, une cravate unie ou en grenadine (bleu profond, gris perle, bordeaux) est presque inratable. Faites un léger rappel de couleur avec la tenue de votre partenaire, sans tomber dans le déguisement. Évitez les logos voyants et les motifs “fun” : une cravate sobre, bien nouée, sera beaucoup plus belle… surtout sur les photos dans dix ans.
Q. Comment porter sa cravate pour qu’elle tombe bien et reste élégante ?
Pour bien comment-porter-sa-cravate, commencez par choisir une longueur où la pointe touche juste le haut de la boucle de ceinture. Formez un nœud qui crée un petit creux sous la gorge, serrez sans vous étrangler, puis ajustez la cravate pour qu’elle tombe bien droit, sans vriller. Enfin, lissez légèrement le pan large avec la main : c’est ce geste qui fait passer votre cravate de “portée” à vraiment maîtrisée.
Mise à jour: 14 novembre 2025 (de l’article publier : 20 décembre 2023 18 h 28)